jeudi 28 novembre 2013

RUN THE JEWELS - Pan Piper, Paris.

Je n'avais jamais entendu parler du Pan Piper avant cette date. Bien localisé pourtant, puisque derrière le Souffle Continu, pas loin du père Lachaise. Et la salle gagnerait à se faire connaitre. On s'y gare facilement, le coin est cool. La salle est assez grande -type Nouveau Casino- et le son est très bon. On le vérifie rapidement quand la première partie, un DJ anonyme, passe des mp3 pendant une heure. Sélection hip hop exclusivement, du old school au trap, pas mal foutue, agrémentée de cuts dans tous les sens. Le sound system est solide, les basses sont impressionnantes. D'ailleurs, quand le DJ sort A Tribe Called Quest, on reste persuadé que ce groupe est le plus épais de tous les temps, bien loin devant n'importe quelle formation doom.
J'ai toujours raté El-P depuis 6 ou 7 ans que j'essai de le voir sur scène. Quand c'est pas une tournée annulée, c'est une date oubliée ou une soirée sold out. C'est pas faute d'avoir saigné ces disques et d'en avoir défendu même certain ici. Killer Mike m'intéresse moins, son album solo m'ayant plus fatigué qu'autre chose. Avec l'excellent album de Run The Jewels, il était temps de corriger le tir.
Run The Jewels se déplace en formation simplifiée. Un DJ, un Killer Mike et un El-P. Exit donc les types derrière synthés et instruments qu'on pouvait voir sur leurs vidéos. Trois types seulement qui montent sur scène sur fond de We Are The Champions de Queen. Les types n'ont pas bu que de l'eau et ont le sens du spectacle. Tout de suite s'enchaine alors rien de moins que l'album fraichement sorti, quasi entier, avec assez peu de temps mort, quelques blagues de temps en temps et des "say Run The Jewels" lancé assez régulièrement par  Killer Mike. La paire est particulièrement énergique. El-P donne. Son flow sec et nerveux est renforcé par une énergie vocale surprenante, il en est presque à crier. Courant, dansant, sautant, les deux s'amusent bien et font vivre avec une rage communicative leur set. Toute la scène est arpenté en long et en large par Jaime & Mike faisant de la soirée un véritable show qui ne peut laisser personne de marbre dans la salle. Bien sur, cette énergie est magnifiquement soutenue par les beats et sons concoctés par El-Producto chez lui à NYC dans son abris, qui sur scène prennent leur aspect de punitions SF sonique sur-puissantes. Expédié le temps de 9 morceaux, le groupe revient très rapidement pour lancer 2 morceaux d' El-P (les excellents "Drones over Bklyn" et "The Full Retard", tirés de C4C) et 2 autres de Killer Mike dont un que le type fera directement dans la fosse, sur fond d'une seule infra-basse martelant le rythme.

Ps: la photo n'est pas de moi, si j'en récupère une décente je la mettrais en lieu et place.

lundi 4 novembre 2013

KICKBACK + LENGTH OF TIME + LODGES - Maroquinerie

Le problème avec les groupes de genre qui ouvrent pour Kickback, c'est la difficulté de s'imposer et de paraitre personnel. Kickback étant désormais une bête unique dont l'espèce et la catégorie sont inconnues, le moindre groupe qui "sonnerait comme" pourrait avoir l'air fade. Lodges, placé là dans les derniers instants souffre cruellement d'un manque de personnalité, d'impact. Le fait que le mec à la voix ait à peu près la même que les milliers de formations du genre pullulant sur scène n'aide pas. Le triple K a déjà exprimé sa fatigue à jouer avec toujours le même type de groupe, et si je suis incapable de dire si Lodges ests dans les petits papiers du trio/quintet parisien, l'impression est en tout cas bien là : mention honorable mais musique vaine. Je regrette de pas m'être déplacé pour l'affiche Yussuf/Cobra/KKK l'an dernier, mais c'est bien fait pour ma trogne.
Length Of Time est un groupe (plus ou moins) associé au H8000, soit une formation Belge qui donne dans le teigneux qui a son lot de fanatiques derrière. Les parties chantées sont bien foutues, et ça joue avec une aisance et une puissance certaine. Le batteur notamment appuie une rythmique impeccable.
Kickback fait partie des groupes où il est impossible de savoir ce qu'il va se passer une fois sur scène, sachant que potentiellement tout le monde dans la salle est en danger. A part eux, je ne vois que Gehenna et Oxbow qui sont apte à instaurer le même climat. Et si personne ne vient faire le malin devant Robinson, Kickback ramène un certain nombre de gaziers en survet et qui font des étirements avant le show. Bienvenue à Super Pro ! Et c'est pendant Length Of Time, finalement, que le gros de la soirée côté public va se passer. A 2 morceaux de la fin, c'est pas loin de 20 types qui se foutent sur la gueule. La situation se tend, l'embrouille gonfle et se déplace dans la salle en effet boule de neige. Et voilà une vingtaine de gars foutus à la porte. 20€ la place. Quitte à se faire sortir, fallait aller ailleurs, le billet étant 2 fois moins cher sur les autres dates de la tournée. Merci la capitale !
Encore 2-3 mouvements ischios-jambiers et quadriceps et on est bons pour accueillir les mecs qui se fendent la gueule avec le Diable. Autant dire que dès que le batteur a terminé de mener la deuxième mesure le constat est clair : Kickback est imbattable sur scène. T'aimes ou t'aimes pas, les petites provocations te font rires ou pas, mais musicalement et scéniquement, c'est la taloche, avec élan certes, mais elle est bien là. Douloureuse. La scène est complètement habitée par les 5, avec un trio solide (Damien/guitare-Stephen/voix-Pascal/basse) et 2 mercenaires (second guitariste et batteur) qui ne font pas de la figuration. Le batteur notamment, arrêtons nous sur le bonhomme. Un type visiblement increvable, qui n'a, d'ailleurs, jamais chaud puisqu'il ne quittera ni sa casquette ni son hoodie de toute la soirée, alors que le gentleman n'est clairement pas économe en mouvements amples. Il tape comme une bête avec une précision remarquable, il ne fait pas tâche suite à Doucet qui tenait les baguettes pour le triple K il y a 10 piges. Je me rend d'ailleurs compte que ça fait 10 ans que je n'ai pas vu le groupe sur scène, pour le mythique concert au Pulp. En 10 ans, la haine a monté en puissance, la rage du groupe sur scène est plus importante encore. Chaque note est investit, chaque hurlement est une incantation, mais jamais sans aller dans une théâtralité metal. Le rapport est physique, le son est palpable, l'ambiance est pesante mais réelle, avec une absence totale de mise en scène.
Le groupe joue massivement des morceaux issus de ces deux derniers disques, "No Surrender" et "Le Diable rit avec nous", n'allant visiter le passé que rapidement. D'ailleurs, en allant jouer un Heaven and Hell en forme de célebration, le groupe prévient les parisiens que ce sera la toute dernière occasion de les voir dans la capitale. C'est dommage si c'est vrai : Kickback est tellement au dessus de toute concurrence sur scène que l'on ne pourra que regretter cette absence. Parce que le groupe ne fait pas que jouer une musique teigneuse et agressive : elle est aussi sauvagement bien branlée dans son "groove" (terme détesté) et son rythme ondulant et efficace. Son rock sale est aussi crade que sinueux, aussi vile qu'addictif.
Au final, on est pas chez Pinder mais on fait les comptes: une bagarre, un coup de tête, 5 ou 6 mollards, une bouteilles jetée à la console, un spot explosé, un retour malmené, 2 jets de micros, et une dizaine d'insultes.


Ps: Si tu passes ici de temps en temps, tu verras que je finirais par mettre une photo du concert. En attendant, c'est l'affiche. Bah oui, on est précaire ou on est pas, on se démerde.