jeudi 22 septembre 2011

My Winnipeg à la Maison Rouge


Installation Vidéo de Guy Maddin (2011)
Voilà une exposition dont j'aurais dû vous parler depuis bien longtemps. Sachant qu'elle prend fin ce dimanche pour partir au tour du monde, il ne vous est certainement pas permis de faire autre chose que d'y aller si vous avez un peu de temps ce week-end. Alors direction la Maison Rouge, pas très loin de Bastille pour découvrir le premier volet d'une exposition des plus stimulantes!


Le concept est simple: il existe de grandes villes dont personne ne parle parce qu'elles n'intéressent personne. Pourtant, des gens y vivent tous les jours et y développent des formes d'art tout aussi passionnantes qu'à Berlin, Tokyo ou New York. C'est le cas de Winnipeg, ville perdue au milieu de l'Etat du Manitoba au Canada, à 8 heures de route de la première grande ville d'influence comparable, Minneapolis de l'autre côté de la frontière.



L'occasion est belle de découvrir un peu cette ville industrielle et souvent enneigée dont le porte drapeau est le cinéaste Guy Maddin. Pierre angulaire de cette exposition, le réalisateur y présente son dernier film, My Winnipeg, faux documentaire semi-fantasmagorique et autobiographique sur sa ville, ainsi qu'une installation de 11 vidéos diffusée simultanément. C'est une nouvelle preuve de l'implication de Maddin dans les circuits artistiques alternatifs: il avait en effet déjà présenté l'un de ses précédents films, Cowards Bend The Knee, dans une galerie d'art à Toronto sous une forme originale. Le film, découpé en chapitre, était diffusé à travers de petits hublots vers lesquels il fallait se pencher, un peu à l'image des peep show. Une volonté de forcer les gens à se mettre dans une position inconfortable pour regarder des choses personnelles, Cowards Bend The Knee étant son "autobiographie".

Il est intéressant d'ailleurs quand on connaît le travail de Maddin, de découvrir les artistes qui l'ont influencés et ceux qu'il a lui même influencé. On pense notamment au travail de Marcel Dzama, emprunt d'une même volonté de cartographier la mythologie d'une ville oubliée. Car Winnipeg est une ville étrange aux confluents de plusieurs fleuves et de plusieurs cultures (indienne, anglaise, française et islandaise). On identifie alors sur la carte de Dzama des endroits, des mythes évoqués dans le cinéma de Maddin. La ville s'est construite des légendes autour du somnambulisme, de la télépathie, des fantômes. Un rapport étroit semble s'être tissé entre une dimension imperceptible, iconoclaste et une nature figée et inquiétante.

Winnipeg Map de Marcel Dzama (2007)

On découvre une ville innovante. La première salle est une prise de contact tout à fait intelligente, elle nous permet de mieux cerner certaines légendes urbaines, certains faits marquants de l'histoire de la ville. Puis l'on s'enfonce dans l'imaginaire de ses habitants, on pénètre dans cette omniprésence de la mort, de l'étrange, de l'incongru, de la famille et de ses turpitude. On s'enthousiasme devant les travaux si personnels et déroutants de Sarah Anne Johnson par exemple qui traite de la maladie mentale de sa mère avec une grande intelligence.
Untitled de Sarah Anne Johnson (2008)

Voilà, ce ne sont que quelques lignes assez rapidement écrites mais elles transcrivent un peu ce que l'on ressent dans cette exposition. Un enthousiasme décontenancé devant la multiplicité des supports et des oeuvres, choses que l'on n'aurait pourtant pas soupçonné une seule seconde lorsqu'on entend le nom de Winnipeg. A signaler pour les pornocrates une salle un peu chaude au sous sol, juste après l'installation de Maddin, où l'étrangeté et le malaise atteignent leur paroxysme.

2 commentaires:

gulo gulo a dit…

winnipeg sans aaron funk est-elle vraiment winnipeg ?

Carnival Of Souls a dit…

Dans le fond c'est une bonne reflexion car le seul art non représenté lors de cette exposition est celui de la musique... Et c'est peut être dommage. Cela étant, Winnipeg reste une ville particulièrement intrigante même sans Venetian Snares.