jeudi 12 août 2010

GLASSJAW, Nouveau Casino


Qu'est ce que je fous là? Je suis entouré de jeunes jouvencelles dont les yeux pétillent devant le squelettique bonhomme qui s'égosille sur la scène. Je reprends depuis le début. Glassjaw, groupe taré de New York sortait en 2000 et 2002 deux albums hors de toutes catégories (à l'époque), revendiquant l'héritage de Quicksand, mais aussi l'influence des Bad Brains, de BURN, d' Anthrax, de Morbid Angel, d'Elvis Costello, des Cure, de Faith No More, de My Bloody Valentine, de la new wave, du hip hop. Mais avec une "crédibilité" hardcore quasi intouchable, de par le passé de certains actifs (le batteur est un ancien CIV, Youth Of Today, et à l'époque future Rival School, le guitariste un ancien membre de Sons of abraham, qui avait sorti un split avec les icônes du new school d'alors: Indecision, etc...). Derrière les manettes, Robinson, créateur du son de la scène metal californienne du début de la décénnie précédente et qui essayait de s'excuser en enquillant coup sur coup Amen, At The Drive In et Glassjaw, aux antipodes de Life is peachy et de 3$ Bill y'all- l'histoire est ainsi faite: Robinson a reproduit Limp Bizkit et Korn. Histoire chaotique, fait d'embrouilles avec Roadrunner et réglé en interview, line up instable dont les deux seuls propriétaire du nom Glassjaw demeurent Daryl Palumbo, chanteur, et Justin Beck, batteur devenu bassiste puis guitariste. Les autres sont partis, se sont fait jeter (par la maison de disque!) ou sont revenus, c'est le cas de Manuel Carrero pour ces deux derniers points. J'ai fini? Non, car Glassjaw donna un concert à Paris suite à son deuxième album (le premier a été entouré d'une tournée avec Soulfly et un show case en Hard rock café), sur invitation si ma mémoire ne me joue pas de tours, puis annula le reste de sa tournée. Puis 2 tentatives plus tard, annulées également pour une raison simple: Palumbo souffre du syndrome de crohn, qui peut se manifester par une crise à n'importe quel moment. 10 ans donc que j'attends de voir Glassjaw. Une date à Paris en 2010? Ca m'en touche une sans réveiller l'autre, mais la fidélité et la curiosité m'ont encourager à cliquer sur "finaliser votre achat" sur un site de billet en ligne. Bien m'en a pris. Si j'ai passé une bonne parti du concert à m'amuser des adorateurs de Palumbo autour de moi (les filles hochent la tête et prennent 451 photos de lui, font des sourires et ont des étincelles dans les yeux quand il chante, pendant que les metalleux, ayant enfilés leur tenues de TRVE Eyehategod/Converge/Slayer/Starkweather, semblent eux aussi boulversés par les couplets emo rock du chanteur de Head automatica), il est surtout impossible de ne pas admirer la qualité du jeu du groupe. Le batteur, débarqué de Saves the day joue impeccablement les parties qu'il n'a pourtant pas composé (Samy Siegler est responsable des batteries sur le premier, alors qu'il semble que ce soit Shanon Larkin, impliqué dans Snot, mais aussi dans Amen ou Ugly Kid Joe qui s'occupa des rythmiques du second album). Le début de Mu Empire est impeccablement balancé, quoique légèrement ralenti. Daryl Palumbo confirme tout ce que l'on peut retirer à l'écoute d'un album du groupe. Hystérie et hurlement se mèlent à une maitrise de la voix qui n'est pas sans rappeler les contrastes esquissés par Moreno dans Deftones. Elastique, ses cordes vocales sont capables de brasser un vaste champs d'action, comme une sorte de Mike Patton moins gourmand mais plus instable. Carrero est un bassiste incroyable. Assez menu, il s'arme d'une basse gigantesque et en joue avec une maitrise du groove et une aisance remarquable. Quand il entame ses rares notes sur le break de Ape Dos Mil, il plonge la salle dans un simili dub troublant et parfaitement rythmé. Beck est de son coté le grand artisan de Glassjaw, chef d'orchestre discret et presque à l'écart, mais qui joue...comme un pur New Yorkais. Rythmé, précis, versatile, passant du taping au bruit pur, du jeux d'effets en passant par le riff type HxC, son jeu est remarquable. Se dégage de l'ensemble un sentiment étrange, d'un groupe qui semble parfaitement à l'aise, incroyablement puissant et précis dans son propre jeu, comme si "Worship & tribute" était sorti deux mois plus tôt, et se retrouvant face à un public qui vit cette musique comme n'étant plus si singulière car prostituée par des groupes grimés défilant sur MTV. Glassjaw joue comme si les 8 dernières années ne s'étaient pas écoulées. Ils pourraient remplir un stade, ils blindent juste le nouveau casino. Mais les fidèles leurs sont dévoués.

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